La terre de Mathias

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Roman de bonne foi, qui ne recherche pas l’originalité, mais la justesse du ton et de l’observation. Ses héros n’ont rien d’exceptionnel. Ce ne sont ni des oisifs préoccupés de leurs états d’âme, cherchant à fuir leur ennui, ni des forçats de l’existence. Sans prétendre à rien, ils subissent les exigences de l’humain, et de la sorte se trouvent en présence, mais naturellement, des vrais problèmes : ceux dont les énoncés viennent d’eux-mêmes, et ceux que leur pose la société de leur époque. A l’occasion du milieu où ils évoluent, l’auteur rend à la résistance du paysan pendant la guerre, et à la résistance tout court, sans nulle grandiloquence, un hommage juste en la plaçant dans sa vérité simple et directe : la passion de la terre sur laquelle on peine et de laquelle on vit. L’empreinte de cette terre sur les âmes, les conflits mineurs du monde paysan et son unité aussi, la légèreté tragique de certains jugements, ou plutôt de certains préjugés, même les erreurs d’une administration déshumanisée, sont des thèmes secondaires qui exercent leurs poussées sur le thème principal, concourant ainsi à l’unité d’une œuvre qui, restant classique dans la forme, montre le cheminement de l’amour à travers les faiblesses de la chair vers sa spiritualisation, lorsqu’il est enfin débarrassé de toute littérature. Roman paysan ? Non. Mais roman qui vient à son heure pour réhabiliter le travail du paysan, le plus essentiel, éclairer aussi les profondeurs trop souvent obscurcies de son âme, la moins empoisonnée de toutes par les gaz délétères que dégage notre civilisation industrielle.